Parking Day | mardi 22 août 2017
Semer des graines et laisser germer
À Lyon, le jardin est un outil stratégique pour réinventer une ville plus verte et créer du lien. Dounia Besson est élue dans le9e arrondissement et s’occupe notamment du renouvellement urbain à la Duchere. Elle est aussi l’adjointe au maire déléguée à l’économie sociale et solidaire et au développement durable, et c’est elle qui a fait du jardin partagé un véritable enjeu pour la ville. On lui a demandé pourquoi.
© la légumerie - Lyon
On ne compte plus le nombre de cadre supérieur qui change de cap, et les loisirs créatif prennent de l’importance. Le jardin, c’est une manière de renouer avec l’essentiel, et c’est ce que les citoyens réclament de plus en plus. Jardiner, c’est aller dans ce sens : revenir vers le lien avec la nature, le sol, sans le béton. Au delà des attentes des habitants, le jardin c’est aussi un formidable générateur de lien social. Même quand j’étais simplement militante à Vanves dans mon micro-quartier autour du 1er collège ZEP de France, j’utilisais le jardinage comme l’un des
1001 prétextes à la politique de la Ville.
Militante hier, politique aujourd’hui : même combat, et de belles réussites : quelque soit leur couleur politique, tous les arrondissements compte des adhérents à la charte des jardins partagés. Il existe 45 jardins, pour 2000 jardiniers bénévoles, le tout en partenariat avec les bailleurs sociaux : un vrai terrain de jeux pour promouvoir le label Lyon ville équitable et durable, et aller vers une ville « douce ».
Une ville plus consciente, grâce à la verdure ? Si les jardins participent au renouvellement urbain, ils sont aussi un prétexte tout trouvé pour parler des enjeux de l’alimentation et des circuits courts, et une manière d’apprendre la démocratie, de favoriser le vivre ensemble et de créer du lien entre les quartiers et avec sa périphérie.
© la légumerie - Lyon
Dans le cadre du plan européen UrbAct , Lyon s’est engagée, via son réseau de jardins partagés, sur les enjeux d’une alimentation durable pour tous. Et ça n’est pas une lubie de bobos, il y a une vraie mobilisation autour de la sensibilisation à ses sujets partout et notamment dans les quartiers dits sensibles. Potagers, hôtels à insectes, composteur grâce à l’aide systématique de la métropole, implication des écoles et crèches
publiques… Autant de moyens d’éduquer à l’alimentation, de mieux vivre avec son environnement et d’appréhender différemment les enjeux de l’espace public.
Chacun apprend et échange les bonnes pratique au contact des autres, et les moments de convivialité font partie intégrante de la vie des jardins. La mairie organise des sessions de formation à la permaculture ou à l’agroécologie en lien avec le pass jardin mais aussi des conférences, des événements festifs pour réunir les jardiniers et là encore, échanger. La vice-présidente de la Légumerie ne savait rien faire, même pas cuisiner, aujourd’hui elle sensibilise sur toute la métropole, elle explique les étapes de son parcours, ses choix… Les bénévoles sont très actifs, on sent un vraie envie de transmettre et un besoin de changement.
Les jardins partagés sont créés sous forme d’association. C’est une manière de mettre le collectif au centre de l’action. Chacun doit prendre l’autre en compte, il faut vivre en bonne intelligence. On est tous humains, parfois il y a des jeux d’ego, parfois on est tout feu tout flamme à la création et puis ça retombe, le noyau dur se retrouve seul, parfois les nouveaux jardiniers ont d’autres revendications, font d’autres choix... Il faut composer, insuffler une dynamique, expérimenter, tester… ça n’est pas toujours rose mais on trouve des solutions pour que chacun trouve sa place sans empiéter sur celle des autres. Bref : une démocratie à petite échelle.
Formations, événements conviviaux, conférences éco-jardinières… La Ville et la Métropole facilitent les échanges entre les différents jardins des différents quartiers. Chaque enjeu est différent, en fonction du territoire, de sa sociologie et de son histoire. Je suis pour l’hybridation et le mélange, ça créé de l’innovation. Ces rencontres favorise les échanges, les coopérations, l’ouverture sur l’autre et l’interpénétration, notamment au travers de ballades d’un jardin à l’autre. Intramuros mais aussi extramuros, en créant un lien avec les agriculteurs et paysans en périphérie.
Mais trouver des espaces est de plus en plus compliqué. Les jardins partagés s’étalent où ils peuvent, notamment en végétalisant les toits. Mais ça n’est pas la panacée, et les gens veulent cultiver en pleine terre, toucher le sol, et on ne peut pas pousser les murs. Dans ce contexte, les jardins ouvriers deviennent un enjeu. Le foncier appartient à la Ville et le jardin individuel est un luxe de plus en plus difficile à accorder. La ville change, la
sociologie change, et il faut le faire entendre. On partage, on explique, on invite les jardins ouvrier aux formations et conférences pour que les uns et les autres coopèrent. La Ville travaille à une convention et une charte commune, intégrant les jardins ouvriers dans l’espace des jardins partagés et sortir de la transmission de père en fils pour un partage plus équitable et plus transparent du territoire.
© la légumerie - Lyon
Les élus discutent, échangent, aident au quotidien, mais laissent chaque jardin libre de ses choix. On n'est pas là pour jouer les donneurs de leçons. C’est un travers qu’on peut vite retrouver dans la politique de la Ville. Soutenir mais laisser faire : les élus sont des facilitateurs (et parfois des diplomates) au service des acteurs. L'enjeu c’est l’espace et la démocratie, il y a une vraie volonté d’agir, on ne doit pas avoir la main mise mais être juste un soutien.
Un soutien financier aussi, même s’il est faible. Je ne vais pas être langue de bois, le financement est anecdotique, on bricole beaucoup, surtout que la Région se désengage sur des secteurs clés : l’alimentation, l’associatif, l’agriculture, la solidarité internationale, tout ces enjeux sont liés, c’est gravissime en terme d’emploi aussi. Il manque clairement un échelon. Mais si tout est lié, les jardins sont aussi un outil d’interpellation politique et la métropole pallie le manque.
Heureusement, car les besoins sont réels. Impossible de dupliquer les choses d’un jardin à l’autre, chacun a ses objectifs et ses impératifs. D’où l’importance de travailler en réseau et mobiliser les habitants pour qu’ils pallient ensemble au manque de certains pouvoirs publics.
Et demain ?
À quoi peut bien rêver Dounia Besson ? Je me souviens qu’à Vanves, quand j’étais petite, nous étions toujours à vélo, c’était assez vert, maintenant on prend sa voiture pour de petits trajets. J’aimerais qu’on revienne à ça. J’imagine une ville verte, avec des fermes et des jardins partagés, où on échangerait et on cuisinerait ensemble. Le partage, la convivialité, de grandes tables, des plaids… Je n’invente pas l’eau chaude, je reprend juste ce qui se faisaient naturellement avant, de manière informelle.
Park(ing) Day 2015 :
le jardin Sauve qui pneu des jardiniers nomades
Il y a deux ans, le collectif des Jardiniers Nomades s’installait sur une place de parking à Lyon. Les Jardiniers Nomades sont des paysagistes qui souhaitent créer une interaction entre les citoyens, ses voisins et leur territoire, en se réappropriant l’espace commun. L’année dernière, il a participé au Park(ing) Day à Lyon, dans le quartier historique de la Croix Rousse. Ils y ont créé le Jardin Sauve qui pneu, « une invitation à la mobilisation citoyenne » en créant un espace d’échange entre groupe scolaires, habitants, street artistes… Le tout autour du réemploi d’éléments liés à la route comme mobilier urbain.
+ d’infos et de photo sur leur site : www.lesjardiniersnomades.com/parking-day
Dédale | Paris | Tél : +33 (0) 6 31 13 35 74 | contact@dedale.info
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