Elles veulent créer un déclic collectif

Elles veulent créer un déclic collectif

Parking Day | mardi 1 août 2017

Elles veulent créer un déclic collectif

Elles sont sociologues, urbanistes, travaillent sur l’engagement citoyen, les langages dans la Ville ou à l’échelle des quartiers. Le collectif grenoblois Déclic nage dans les mêmes eaux que Dédale (qui organise Park(ing) Day en France) et à puisqu’à plusieurs, on va plus loin, on a décidé de vous en parler.

declic collectif
 

Bonjour ! Qui êtes-vous, collectif Déclic ?

Pour la petite histoire, Déclic est né d’une rencontre entre “utopistes” de la ville à échelle humaine : Michaëlle est urbaniste et placemaker, Préscilia est urbaniste et sociologue, Anne-Laure est politologue spécialisée dans l’environnement.

Nous nous sommes retrouvées autour d’une envie de penser la ville autrement. Nous souhaitons redonner du pouvoir d’agir aux citoyens pour qu’ils puissent se positionner en tant qu’acteur sur leur cadre de vie. La mission de Déclic est donc de permettre aux citoyens de concevoir, gérer et animer les espaces urbains de leur quartier.

C’est ambitieux ! Ça passe pas quoi ?

Pour mettre en œuvre cette mission, nous poursuivons 4 objectifs tournés vers l’intégration des citoyens dans la politique de la Ville : Promouvoir et développer le placemaking , c’est-à-dire l’appropriation des espaces par ses habitants pour retisser du lien social ; encourager l’intégration des usagers dans la réflexion, la conception et la gestion des espaces publics ; accompagner les collectivités et leurs habitants dans leurs projets de création ou transformation d'espaces publics en véritables lieux de vie sains, sûrs, conviviaux et durables et enfin, mobiliser les citoyens et leur donner envie d'agir sur leur cadre de vie (grâce notamment à Park(ing) Day.

En parlant de Park(ing) Day, vous avez participé l’an dernier ?

Oui, Nous avons investi plusieurs places de stationnement attenantes à la place Championnet à Grenoble. Pourquoi cet endroit? Parce que c’est un espace passant (commerce, marché à proximité) au bout de la rue Lakanal dont la piétonisation est une hypothèse. Notre volonté était donc de montrer aux habitants qu’il est possible d’utiliser l’espace public autrement, que l’espace alloué à la voiture pourrait être ponctuellement ou partiellement dédié aux piétons pour redonner un peu de vie aux pieds de nos immeubles.

Et de quelle manière avez-vous fait passer le message ?

Nous avons imaginé trois espaces :

- Un espaces de convivialité, pour une ville plus partagée.
Le parking devient terrasse et invite à prendre le temps de s’arrêter et de se rencontrer. Nous avions installé des tables et des chaises de jardin, la boutique le Jardin du thé nous avait offert de quoi faire du thé glacé et une de nos amies apprentie pâtissière a proposé une dégustation de muffin au chocolat vegan et sans gluten. Ces installations nous ont permis de capter les gens et d’amorcer les discussions.
- Un espace “ usages éco-citoyens ” pour une ville plus durable,
Là, place aux vélos, au compostage et à l’agriculture urbaine. Nous avons installé des jardinières avec des plantes aromatiques en libre service (verveine + basilic) et proposé à l’association La citrouille (atelier de réparation de vélo) de se joindre à nous. Ils sont donc venus tenir un stand de réparation de vélo quelques heures. Grenoble-Alpes Métropole était présente aussi avec un composteur individuel en démonstration.
- Un espace ludique, pour une ville plus désirable.
Le club d’échec l’échiquier grenoblois nous a prêté son jeu d’échecs géant et les passants (dont l’élu de secteur) ont pu se mesurer seuls ou en équipe.

Vous vous êtes beaucoup entourées !

Oui, notre premier Park(ing) Day se voulait vraiment collaboratif, on tenait beaucoup à ne pas faire ça seules dans notre coin. La Ville de Grenoble a été prévenu en amont et nous a offert un soutien logistique (matériel + affiches + communiqué de presse). Nous profitons d’être dans la seule grande ville “verte” de France pour que les collectivités embarquent avec nous sur ce genre d’initiatives.

Votre premier… Vous comptez donc continuer cette année ?

OUI, on recommence cette année ! On garde les mêmes ingrédients, on se place au même endroit, d’autant plus que la rue Lakanal devrait très prochainement accueillir moins de voitures. On est toujours sur le principe de champ des possibles sur l’espace public mais en essayant d’entraîner plus d’acteurs avec nous.
Nous sommes encore en train de formaliser toutes nos idées, voici ce qu’on envisage : un espace de convivialité dans lequel les habitants du quartier et nous pourrions déjeuner ensemble, la découverte de la long board pour parler mobilité douce, un jeu géant (on hésite encore en échecs ou mikados), un place pour l’agriculture urbaine, une piste de danse et un piano et une touche artistique !

Comment voyez-vous la place de la voiture dans la ville ?

Avec l'essor de la voiture, la ville s’est développée autour de son usage. Les espaces publics sont principalement pensés pour pouvoir se déplacer en voiture, stationner sa voiture, faire ses courses en voiture... La vie s’est peu à peu retirée dans les espaces privés. Nous n’avons jamais été aussi nombreux à vivre au même endroit, pourtant la cohésion sociale et loin d’être une évidence.
Nous sommes convaincues que la manière dont on aménage la ville influence les modes de vie et inversement, même si la ville évolue plus lentement que la société, les deux sont liées et s’influencent l’une l’autre. Si on veut une société plus inclusive, plus soucieuse de l’environnement, plus citoyenne, l’espace dans lequel vit cette société doit permettre d’atteindre ces objectifs.

Et en dehors du Park(ing) Day, quel est le projet en cours ?

Nous menons actuellement une étude de conception pour le réaménagement d’un square à Fontaine (38). Nous accompagnons la collectivité dans l’écriture du plan guide d’aménagement. Afin d’intégrer au mieux les usages existants et souhaités par l’ensemble des parties prenantes, nous organisons des ateliers “placemaking” sur l’espaces, installons du mobilier éphémères et des animations en lien avec le futur aménagement. Cette démarche nous permet d’aller directement à la rencontre de ceux qui utilisent et gèrent l’espace, et de
tester certains usages.

Et pour y arriver, quels sont les leviers ?

Pour recréer du lien entre habitants et élus et redonner de l’intérêt notre solution s’appuie sur la mise en œuvre rapide d’actions concrètes issues de la démarche de Placemaking peu utilisée en France. Par exemple, plutôt que de mener une concertation sous forme de grandes réunions publiques en parallèle des études d’aménagement, nous proposons d’expérimenter de façon concrète, ludique et pédagogique différentes pistes d’aménagement. Pour cela, nous nous concentrons sur les usages. À partir de la typologie et du contexte d’un espace, nous testons différents usages, recueillons les envies et les craintes de l’ensemble des parties prenantes et observons comment l’espace se vit au quotidien. Ensuite, nous proposons un programme d’aménagement basé sur l’usager, qui prend en compte les contraintes techniques et de gestion.

Et le numérique ?

Pour une personne lambda, un des grands obstacles, c’est le temps. Les citoyens n’ont aujourd’hui pas ou que peu de temps à consacrer à ces enjeux qui souvent les dépassent. En ce sens le numérique peut être une piste de solution intéressante à explorer. Comment est-il possible de prendre part à un projet grâce à un outil numérique? Comment le numérique peut il favoriser la compréhension des enjeux liés à l'aménagement urbain? C’est un outil qu’on ne maîtrise pas (encore) chez Déclic, mais le numérique a très certainement un bel avenir en urbanisme.


Les usagers sont donc des acteurs ou architectes des évolutions de la Ville ?

Nous pensons qu’à notre échelle il est possible de renforcer la cohésion sociale et le vivre ensemble. Les habitants ont ancré en eux le fait que payer leurs impôts suffit à faire sa part dans la conception de nos villes. Les collectivités auraient, elles seules, la charge de planifier et gérer notre cadre de vie commun. Nous défendons l’idée selon laquelle les habitants doivent reprendre une partie de cette responsabilité. Prendre part aux décisions d’aménagement, à la gestion de certains espaces de proximité, c’est participer à redonner vie aux espace publics et favoriser l'émergence de villes saines, sûres, conviviales et durable.

Ça fait rêver… En parlant de rêves, elle ressemble à quoi, votre utopie de ville idéale ?

Mickaëlle : Dans ma ville idéale il y aurait des fruits et des fleurs que l'on pourrait cueillir, des échanges de sourires et des enfants qui pourraient jouer dans les rues.

Prescilia : Dans la mienne, les voitures ne stationneraient plus dans les rues, les gens se retrouveraient dans les rues, les parcs, les places après le boulot, les enfants y pourraient jouer en sécurité.

Anne-Laure : Dans ma ville idéale, chacun aurait sa juste place, les voitures à l’entrée de la ville, et les gens dans la ville. Un même espace servirait le matin au marché, l’après midi à un cinéma de plein air, où des gradins jailliraient du sol et le soir et les weeks-end, des espaces de jeux.

Merci !

Elles vous ont intéressées ? (Nous aussi)
Pour en savoir plus, visionnez cette vidéo de Julie Fontana, pour le Collectif Déclic : https://vimeo.com/183874961

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